Excellence,
Nous, jeunes africains, défenseurs des libertés et de la dignité humaine, Avec le soutien des déffensseurs de la liberté et des droits humains, avons appris avec affliction la condamnation à la peine de mort de Mohamed Cheikh ould Mohamed Mkhaïtir, accusé d’apostasie malgré ses dénégations.
Cette lourde peine a été motivée par le fait que l’accusé Mohamed Cheikh ould Mohamed Mkhaïtir, aurait « parlé avec légèreté du prophète Mohamed (PSL) dans un article » dans un article paru 30 décembre 2013 sur des sites internet mauritaniens, « La religion, la religiosité et les forgerons »s, dans lequel il se référait à certains faits historiques datant de l’époque du Prophète rapportés par des érudits musulmans. Des faits qui, selon lui, ont été utilisés à mauvais escient en Mauritanie par la caste des « Zawayas », ou marabouts, afin d’établir leur domination sur la caste des « forgerons » dont il est lui-même issu. Il accusait la société mauritanienne de perpétuer un "ordre social inique hérité" de cette époque.
Dans une tribune publiée le 31 décembre 2013, Mohamed Cheikh ould Mohamed Mkhaïtir, a entrepris d’apporter des éclaircissements à ses affirmations en déclarant textuellement : « A tous ceux qui ont sciemment mal compris mon propos, vous savez bien que je n’ai pas blasphémé à l’encontre du prophète (paix et salut d’Allah sur lui)
Aux bonnes personnes qui n’ont reçu que l’information déformée, je dis : Sachez que je n’ai pas blasphémé à l’encontre du prophète (paix et salut d’Allah sur lui) et que je ne le ferai jamais. Je comprends certes l’ampleur de votre propension à défendre le prophète car elle est identique à ma propre propension à le défendre et à l’amour que je lui porte. Je vous assure que nous sommes tous égaux quant à la défense de tout ce qui nous est sacré ». Cet éclaircissement est encore visible dans certains sites, ainsi que sur sa page Facebook, la date de publication faisant foi.
Or, le crime d’apostasie est régi par l’article 306 alinéa 1et suivant du code pénal sous la section IV (intitulé Attentat aux mœurs de l’islam) du titre II de l’ordonnance du 9 juillet 1983 portant institution du code pénal : « Tout musulman coupable de crime d’apostasie, soit par la parole, soit par action de façon apparente ou évidente, sera invité à se repentir dans un délai de trois jours ».
Malgré l’absence de définition de ce qu’est l’apostasie dans cet article de loi, ainsi qu’une définition précise et homogène dans les textes religieux, on peut s’accorder sur le fait que l’apostasie est l’attitude d’un individu qui renonce publiquement et de façon claire à une doctrine ou une religion.
Et il est aisé de noter qu’entre des paroles dites « légères » et un acte de renoncement public d’une religion il y’a une très grande différence.
L’interprétation de la loi pénale se veut stricte, nul ne peut être qualifié d’apostat pour avoir parlé de façon « légère du prophète (PSL) ». Ainsi, si la parole dite « légère à l’endroit du prophète (PSL) » est condamnable, cette condamnation doit être proportionnée à l’acte incriminée. Or qualifier une parole - légère – fut- elle à l’endroit du prophète (PSL), d’apostasie est au moins juridiquement disproportionné au regard du droit mauritanien. Car le juge pénal ne peut interpréter largement une loi pénale que dans un sens favorable au prévenu. Et tel n’est pas le cas dans le verdict de l’affaire Mkheitir.
Les avocats qui se sont portés volontaires pour sa défense ont subi de violentes pressions de la part de la société ainsi que de la part des organisations religieuses extrémistes.
Les deux avocats commis d'office pour la défense ont insisté sur le repentir exprimé par l'accusé et estimé que cela devrait être pris L’accusé a affirmé devant la cour: "Si on peut comprendre (à travers mon texte) ce pour quoi je suis inculpé, je le nie complètement et m'en repens ouvertement."
Il réitéra aussi cette position devant les juges lors du procès, mais rien n’y fait et malgré ses dénégations, la bien-pensante avait décidé de sacrifier pour l’exemple, celui qui osa traiter des problèmes de discriminations à l’encontre des forgerons.
Dans cette affaire, la partialité du juge est flagrante. Le repentir de M’kheitir n’a pas eu d’incidence ni sur la qualification juridique de son acte ni sur l’issue du procès. Ainsi, le principe du procès équitable dont doit jouir tout justiciable a été bafoué par la justice mauritanienne. L’instruction, dans cette affaire ne s’est faite qu’à charge et ce à l’encontre du prévenu, sous la pression politico-religieuse.
Une violation manifeste des droits de la défense, l’absence de procès équitable, l’instruction à charge et le défaut de qualification légale de l’incrimination, ont été constatés.
A ce titre, nous vous prions de :
- Procéder à la libération immédiate et sans condition de Mohamed Cheikh ould Mohamed Mkhaïtir.
- Garantir sa protection contre tout acte de torture et mauvais traitements.
Veuillez agréer, Excellence, nos salutations respectueuses.
Premier signataires