Nous voulons nous contracepter

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Au personnel de représentation publique,
Aux membres de l'exécutif d'état et des collectivités,
Au corps professionnel de santé et de recherche,
À chacune et chacun d'entre nous,

Nous voulons nous contracepter
manifeste de personnes contraceptées en réaction à la décision de police sanitaire de l'ANSM du 10/12/2021 concernant l'anneau contraceptif Andro-switch

Nous nous contraceptons, nous voulons que tous·tes puissent se contracepter selon leurs besoins, et aient donc accès au maximum de moyens de contraception permettant un vrai choix individuel et/ou partagé.
Nous considérons que la contraception est une affaire de santé publique, de société, et donc que la question de la contraception masculine est cruciale.
Nous pratiquons la contraception thermique par remontée testiculaire, une méthode validée cliniquement mais non réglementée.

Début décembre 2021, l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) a publié une DPS [1] (Décision de Police Sanitaire) notifiant [2] l'interdiction de mise sur le marché de l'Andro-switch [3] (un dispositif de contraception par remontée testiculaire). Le motif de cette décision est l'absence de certification CE (Conformité aux règlementations communautaires Européennes). Elle intervient suite à l'augmentation rapide du nombre d'utilisateurs.

Nous reconnaissons le bien-fondé de cette décision. Cependant, ce n'est pas par défaut de la méthode de remontée testiculaire mais faute d'engagement financier que sa pratique reste dans une zone grise.

En dépit de cette décision, nous continuerons donc à :
   - utiliser l'Andro-switch et d'autres dispositifs autofabriqués pour nous contracepter ;
   - accompagner toutes les personnes qui souhaitent ou souhaiteront faire de même pour minimiser les risques de leur pratique contraceptive ;
   - promouvoir l'utilisation de la contraception testiculaire thermique – quel que soit le dispositif envisagé – afin d'élargir l'accès à la contraception au plus grand nombre.


Dans ce qui suit, nous rappelons et expliquons notre point de vue sur la situation, puis nos attentes vis-à-vis du gouvernement et du corps médical, et enfin nos espoirs pour la société.


Un bref historique
La contraception est généralement considérée comme une problématique propre aux femmes. Ce préjugé génère des inégalités de charge mentale et médicale, et participe à justifier le manque d'engagement des hommes [4]. Dès les années 70, des groupes d'hommes ont volontairement expérimenté de nouvelles méthodes de contraception. En 1994, une étude française dirigée par le Dr Mieusset validait – après plusieurs décennies de recherche – la possibilité d'utiliser la remontée testiculaire comme méthode de contraception efficace, sûre et peu invasive [5]. Peu d'études et de développements ont été réalisés depuis par manque de financements et de volonté publique. Cette technique était donc utilisée par les quelques hommes pouvant bénéficier des consultations du Dr Mieusset et/ou via des dispositifs autofabriqués non contrôlés. Depuis 2019 est diffusé le premier dispositif commercial de contraception thermique par remontée testiculaire, conçu par Maxime Labrit sous l'appellation "Andro-switch". Cet outil a généralisé l'accès à la pratique de la remontée testiculaire et à l'information sur cette méthode.


Avis sur la décision de l'ANSM
Nous considérons important de bénéficier d'une règlementation assurant la qualité, l'efficacité et la sécurité des dispositifs médicaux mis sur le marché. À ce titre, la certification CE est un outil nécessaire pour l'ensemble des dispositifs contraceptifs, comme pour tout dispositif médical.
Nous constatons d'ailleurs l'insuffisance de la recherche, de la formation, et aussi de l'engagement du corps médical sur les contraceptions testiculaires [6]. Nous sommes, à l'instar de l'ANSM, dans l'attente d'études cliniques afin de faire progresser la connaissance et les aspects pratiques de ce moyen de contraception.
Cette décision est donc justifiée, et elle vient mettre en lumière l'absence flagrante d'implication des pouvoirs publics sur les enjeux de contraception testiculaire et plus largement de partage de la charge contraceptive dans la société française.


Nos attentes et espoirs


Nous voulons croire que la DPS de l'ANSM est le signal indiquant pour la société civile, le corps médical et les autorités, le besoin crucial d'actions, d'études et de réflexions sur le sujet.


Nous demandons à l'État, en particulier aux candidat·es à la présidentielle, à nos représentant·es, aux pouvoirs publics de s'engager sur les points suivants :
   - soutenir les travaux de recherche médicale, de certification et de production de contraceptifs testiculaires ;
   - favoriser la formation des soignant·es ;
   - soutenir les associations qui participent à l'information et à l'accompagnement des usagers aux méthodes de contraception testiculaire ;
   - faire évoluer les programmes d'éducation sexuelle pour y intégrer les enjeux d'égalité contraceptive ;
   - informer l'ensemble de la société sur les contraceptions testiculaires ;
   - rendre les contraceptifs testiculaires et l'accompagnement médical associé accessibles financièrement pour tous·tes [7] ;
   - favoriser l'accès au suivi de l'efficacité contraceptive par spermogramme en laboratoire de biologie médicale et par autotests – vérification qui confère à ces méthodes un avantage certain de contrôle et donc de fiabilité.


Nous attendons des professionnel·les de santé et de recherche médicale un engagement sur :
   - l'accessibilité du suivi médical de ces méthodes, notamment par la formation des généralistes et l'intégration au parcours médical de chaque personne concernée d'une consultation d'andrologie ;
   - une augmentation du nombre de laboratoires pratiquant les spermogrammes ;
   - le développement des études [8] pour une meilleure connaissance des mécanismes et effets secondaires de ces méthodes ;
   - la qualité du suivi : que les professionel·les de santé s'engagent à informer justement et précisément leurs patient·es, et à prendre en compte l'adéquation, les effets secondaires et l'acceptabilité des méthodes contraceptives conseillées.


Nous souhaitons que chacun et chacune participe à :
   - une meilleure prise de conscience de la charge contraceptive (financière, psychologique, physiologique) ;
   - une réelle réflexion et discussion sur la contraception entre les personnes concerné·es et notamment au sein des couples hétérosexuels où de nombreux déséquilibres de charge existent ;
   - un meilleur investissement de la part des hommes en général dans la pratique contraceptive ;
   - la prise en compte des conséquences écologiques [9] des divers moyens de contraception ;
   - un mouvement de diffusion d'informations exhaustives et fiables ; de soutien et d'implication sur les sujets de contraception autour de nous, individuellement et par les associations militantes ;
   - plus largement une avancée des questionnements et des échanges sur notre société et sur nos pratiques relationnelles, sexuelles et genrées.

Nous invitons toutes celles et ceux qui partagent ces attentes à signer ce manifeste à nos côtés, à s'informer et à informer.

Le collectif de rédaction Nous Voulons Nous Contracepter
NousVoulonsNousContracepter@protonmail.com

[Renvois]
1 https://ansm.sante.fr/actualites/decision-du-10-12-2021-dispositifs-medicaux-andro-switch-societe-thoreme
2 https://ansm.sante.fr/actualites/anneau-contraceptif-masculin-andro-switch-il-faut-demontrer-lefficacite-et-la-securite-du-dispositif-1
3 https://thoreme.com/contraception-naturelle-dite-masculine-protocole-et-outils/
4 Cécile Thomé La sexualité aux temps de la contraception. Genre, désir et plaisir dans les rapports hétérosexuels (France, années 1960 - années 2010) https://journals.openedition.org/genrehistoire/5397
5 R.Mieusset, L.Bujan (1994) The potential of mild testicular heating as a safe, effective and reversible contraceptive method for men. Int J Androl 17 : 186-91
cf https://congres.eska.fr/pdf/Jean%20Cohen%202014%20Mieusset%20R..pdf
6 J.Tcherdukian, R.Mieusset, J.-C.Soufir, E.Huygues, T.Martin, G.Karsenty, E.Lechevalier, J.Perrin (2020) Contraception masculine : quelles (r)évolutions ? https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1761676X20300493
7 via une future loi sur la sécurité sociale, par exemple https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/amendements/4523/AN/255
8 Si utilisez la contraception par remontée testiculaire depuis plus de 6 mois, vous pouvez d'ores et déjà participer à cette étude en cours : http://cicec-antilles-guyane.org/nouveau/index.php/cic-etudes/testis
9 nous entendons par impact écologique : leur fabrication, leur utilisation, les déchets et l'ensemble des polluants qu'ils génèrent.


Image : (c) Estine Coquerelle

Mobilisation créée par Usagers de contraception testiculaire
11/1/2022

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