Soutien à Jacqueline Tiarti

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Lettre ouverte à M. le Président de la République

M. le Président de la République,

Jacqueline Tiarti, mère d’une petite fille autiste de 7 ans, est en grève de la faim depuis 15 jours. Elle attend depuis 2 ans et demi une place dans un SESSAD spécialisé qui accompagnerait sa fille pour favoriser son inclusion à l’école et dans ses lieux de vie (domicile, lieux de loisirs). Aujourd’hui, par cet acte, elle exprime sa révolte que sa fille ne puisse bénéficier de l’accompagnement auquel elle a droit.
Le dernier plan Autisme 2013-2017 prévoit la création de 850 places de SESSAD mais cela est bien insuffisant. Aujourd’hui encore, les décideurs et l’opinion publique pensent très majoritairement que la place des enfants handicapés est en institut. Marie Derain, adjointe du Défenseur des droits se désolait le 12 juillet dernier qu’au moins 5,000 enfants handicapés soient sans place en institut à la prochaine rentrée. Or ce ne sont pas de nouvelles places en instituts fermés qu’il faut pour les enfants handicapés. Si, au lieu de pratiquer l’exclusion des enfants handicapés dans des établissements ségrégés, on accueillait plus d’enfants handicapés dans les écoles ordinaires, avec l’accompagnement nécessaire, cela libèrerait des places dans les établissements médico-sociaux pour ceux qui en ont vraiment besoin. Ce qu’il faut, ce sont des services tels que les SESSAD (Services d’Education Spéciale et de Soins à Domicile) qui permettent l’inclusion des élèves handicapés dans des établissements scolaires ordinaires, que ce soit en classes ordinaires ou en classes spécialisées (CLIS/ULIS).
Aujourd’hui encore, l’orientation privilégié des enfants autistes, c’est l’ « institut », sans ouverture vers le milieu ordinaire. On envoie ces enfants :
soit en IME (Institut Médico-Educatif) : en France, seuls 9% des enfants fréquentant des IME sont scolarisés à temps partiel en établissement ordinaire
soit à l’hôpital de jour ; à Paris, seuls 40 à 50% des enfants fréquentant les hôpitaux de jour sont scolarisés en établissement ordinaire, et même quand ces enfants sont scolarisés, les hôpitaux de jour n’interviennent que très peu pour soutenir l’inclusion : tout juste sont-ils présents à trois réunions d’équipe éducative par an quand certains SESSAD ont pour pratique d’intervenir une fois par semaine en classe, en soutien de l’équipe enseignante. Pour ne citer que Paris, il y a environ 700 places en hôpital de jour (accueillant très majoritairement des enfants autistes) contre seulement 100 places de SESSAD autisme ;
A ce manque de places en SESSAD s’ajoute le scandale de la précarité des Auxiliaires de Vie Scolaire (AVS). Les AVS sont clés pour l’accompagnement de beaucoup d’ enfants handicapés mais elles n’ont que des contrats précaires, une formation limitée et leurs contrats ne pouvant dépasser 6 ans, l’ensemble de la communauté éducative perd leurs compétences au bout de 6 ans.

En 1994, la France a signé, avec 92 états membres de l’Unesco, la Déclaration de Salamanque, affirmant :
« Nous sommes convaincus et nous proclamons que :
l’éducation est un droit fondamental de chaque enfant qui doit avoir la possibilité d’acquérir et de conserver un niveau de connaissances acceptable,
chaque enfant a des caractéristiques, des intérêts, des aptitudes et des besoins d’apprentissage qui lui sont propres,
les systèmes éducatifs doivent être conçus et les programmes appliqués de manière à tenir compte de cette grande diversité de caractéristiques et de besoins,
les personnes ayant des besoins éducatifs spéciaux doivent pouvoir accéder aux écoles ordinaires, qui doivent les intégrer dans un système pédagogique centré sur l’enfant, capable de répondre à ces besoins,
les écoles ordinaires ayant cette orientation intégratrice constituent le moyen le plus efficace de combattre les attitudes discriminatoires, en créant des communautés accueillantes, en édifiant une société intégratrice et en atteignant l’objectif de l’éducation pour tous ; en outre, elles assurent efficacement l’éducation de la majorité des enfants et accroissent le rendement et, en fin de compte, la rentabilité du système éducatif tout entier. »

La France est encore loin d’avoir appliqué les principes de la Déclaration de Salamanque.
Nous soutenons Jacqueline Tiarti dans sa demande, pour sa fille, d’une place en SESSAD. Nous demandons des actions fortes, pour tous les enfants handicapés, visant à augmenter beaucoup plus rapidement le nombre de places de SESSAD et à favoriser leur inclusion scolaire :
transformation de la moitié des places d’IME en places de SESSAD,
transformation de 80% des places d’hôpital de jour en places de SESSAD,
ouverture d’autant de classes spécialisées (CLIS et ULIS) que nécessaire (incluant la formation de professeurs spécialisés),
mise en œuvre, dès la rentrée 2013, des recommandations du rapport rédigé par Pénélope Komitès sur la professionnalisation des Auxiliaires de Vie Scolaire,
rétablissement des RASED, avec une mission particulière confiée aux professeurs de RASED visant à la mise en place, en classe, des adaptations pédagogiques nécessaires aux élèves handicapés scolarisés dans l’établissement (sur le modèle des « Pédagogues Thérapeutiques » en Espagne)
Nous vous remercions par avance de l’attention que vous porterez à nos demandes et vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, nos salutations les meilleures.

Au nom du groupe de soutien de Jacqueline Tiarti

Mobilisation créée par Baki Youssoufou
21/7/2013

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